
« ESG washing : l’art de verdir la corruption », par Pierre-Samuel Guedj, expert Durabilité, Vigilance ESG & Stratégies d’Impact RSE
ESG washing : l’art de verdir la corruption
Quand les engagements environnementaux et sociaux deviennent une façade pour masquer des pratiques opaques et détourner la confiance des parties prenantes.
On connaît le greenwashing : l’usage abusif ou trompeur d’arguments environnementaux, et j’ai déjà abordé le sujet du compliance washing.
Mais l’ESG peut, lui aussi, devenir un outil de blanchiment d’image une forme de corruption douce, « verte » ou « sociale », lorsque les engagements affichés servent à masquer des pratiques problématiques.
L’étude « Analyzing the Interconnection Between ESG Criteria and Corporate Corruption » conclut que le greenwashing a un impact mesurable sur la confiance et sur le risque de corruption, montrant que des entreprises notées ESG élevées peuvent encore avoir des incidents de corruption non dévoilés.
Le rapport de Transparency International sur l’anticorruption dans les standards ESG met en évidence que le manque d’harmonisation des normes et de transparence crée des failles dont certains acteurs profitent pour dissimuler des pratiques douteuses.
Enfin, dans une revue portant sur plus de 1 000 études ESG, certains travaux révèlent que l’amélioration apparente des performances ESG peut s’accompagner de pratiques telles que l’optimisation fiscale agressive ou l’évasion légale, souvent difficilement détectables dans les rapports publics..
Certains exemples permettent de mettre en lumière les risques typiques liés à l’ESG:
– Label ESG brandi comme assurance d’intégrité, mais absence de vérification indépendante, absence de sanctions en cas de manquement.
– Projets « verts » ou « sociaux » très médiatisés, mais financés via des filiales opaques, dans des juridictions peu transparentes, ou associées à des partenaires douteux.
– Politiques RSE internes respectables, mais arrimage aux pratiques fiscales, à l’achat de matières premières, à la chaîne d’approvisionnement souvent troublante.
L’ESG opportuniste, est une menace pour la confiance. Quand on ne voit pas derrière le vernis, la désillusion est pire que l’absence de démarche.
Idéalement le vrai ESG devrait :
– rendre publics les audits externes ou contrôles indépendants,
– publier les incidents de gouvernance ou de corruption,
– mettre en place des voies de recours / d’alerte crédibles.
L’ESG ne devrait pas être une vitrine, mais un contrat moral, visible, évalué, révélé.